Pour une fois, mon trisaïeul Antoine Wendling laisse de côté son domaine de prédilection, l’architecture, pour aborder un thème de saison : le foie gras de Strasbourg. Même si, au travers de son article, on remarque que le patrimoine bâti n’est jamais très loin, le cœur de son article concerne une figure de son temps. Notre époque a sans doute oublié ce personnage considérable qu’était Auguste Michel, pape du foie gras, mais aussi écrivain, mécène et amphitryon du Kunschthaafe.
L’histoire alsacienne du foie gras
Mythifiée par la célèbre anecdote du pâté de foie gras servi au maréchal de Contades par son cuisinier Clause, l’histoire du foie gras d’oie en Alsace est bien plus ancienne. Antoine Wendling rappelle ainsi le rôle joué par les communautés juives dans sa transmission. En Europe centrale, en effet, les Juifs engraissaient des oies dont ils utilisaient la graisse, leurs lois interdisant toute autre graisse pour cuire de la viande.
L’avènement d’Auguste Michel
Depuis Clause, de nombreuses maisons de foie gras prospèrent à Strasbourg. Mais c’est à Schiltigheim que le jeune Auguste Michel va faire ses premières armes. Son père, fameux cuisinier lui-même, y tient la Rothes Haus, Maison rouge très différente de celle dont mon arrière-arrière-grand-père à récemment a raconté l’histoire.
Auguste Michel y fait son apprentissage culinaire, y apprend l’art de recevoir. Peu à peu, il y développe la fabrication de son foie gras. La clientèle strasbourgeoise le réclame de plus en plus en ville. Avec la boutique de la rue Mercière débute une aventure industrielle qui suscite une certaine admiration chez Antoine Wendling.
Le Schloessel et l’usine de foie gras
Les affaires sont si florissantes qu’Auguste Michel fait l’acquisition, en 1897, du Schloessel de Schiltigheim. Mon trisaïeul essaie d’en préciser l’emplacement, puisqu’il n’en reste pas la moindre trace.
Pas de trace non plus de la grande usine dont Michel entoure son élégante demeure. Il va y décupler sa production et mettre en œuvre des recettes dignes d’un capitaine d’industrie d’une étonnante modernité. Publicité, marketing, packaging, expédition viendront relayer une
maîtrise totale de la chaîne de production et des techniques de conservation. Reconnu parmi ses pairs, Auguste Michel gagne d’innombrables prix et médailles, préside des jurys gastronomiques et dirige même le Hauptrestaurant de l’Exposition d’Industrie et d’Artisanat de 1895 à l’Orangerie.
Le mécénat du foie gras
Soucieux de promouvoir une identité alsacienne qui laisse Antoine Wendling réticent, Auguste Michel s’entoure d’une phalange d’artistes de tous les domaines. Il les réunit chez lui, régulièrement, autour des fameux repas du Kunschthaafe, la marmite des arts où bouillonnent talents et idées.
Les réflexions de ce Stammtisch produiront la Revue Alsacienne Illustrée, le Musée alsacien, mais aussi l’image un peu illusoire d’une Alsace de cartes postales. Dont Michel se servira allègrement pour la promotion de ses produits.
Antoine Wendling racontera prochainement le Kunschthaafe plus en détail. Son mécène, hélas, disparaîtra prématurément, en 1909, à l’âge de 50 ans.
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